16 mars 2015

Je suis un homme hétéro et pourtant j'aurais voulu être une femme...

Je suis hétéro et pourtant j’aurais voulu être une femme.

Niko

Bonjour et bravo pour votre travail, le site est impressionnant, très complet et l’implication des intervenants remarquable.
Bien qu’ayant trouvé quelques cas possiblement similaires au mien, je souhaite témoigner de la douleur que l’on peut éprouver lorsque rien ne peut combler le désir d’être autre, et aussi parce que cela fait du bien simplement d’écrire en sachant que l’on va être lu, et sans doute attentivement. Excusez-moi par avance si mes propos vous semblent triviaux et futiles, mais ils témoignent d’un trouble réellement sincère.
Je suis parisien, profondément amoureux des femmes. Je vis en couple une vie sexuelle très active, ce qui ne m’empêche pas de facilement perdre une journée entière à collectionner sur internet des images et des films et d’être encore, et plus que jamais, bouleversé quand je croise une belle femme dans la rue.
J’ai compris avec le temps et l’expérience pourquoi cette émotion brutale, ce désir était presque d’avantage une douleur qu’un plaisir.
Cela peut sembler ridicule, mais l’étincelle, ce qui a m’a fait me formuler clairement ce qui me tourmentait depuis toujours, est venue en croisant un jour dans la rue une femme en tailleur et talons hauts.
Elle est passée devant moi dans un halo de grâce et de sensualité et j’ai soudain ressenti un désespoir profond, confus et inconsolable.
J’ai alors compris que ce n’était pas du désir sexuel inassouvi (ou pas que) mais surtout la sensation d’injustice profonde à ne pas pouvoir être elle. Une sensation dans ma chair, un appel irrésistible de mon être à avoir le droit de sentir mes cuisses gainées de nylon frotter contre le satin de la jupe, d’avoir le pied cambré par des escarpins, de sentir ma poitrine bouger et mes cheveux voler au vent.
Cela a été long à identifier mais j’ai enfin réalisé un jour qu’aucun rapport sexuel ne pouvait apaiser mon insatisfaction… et que ce que mon âme exprimait n’était pas la volonté d’avoir mais bien d’être !
Ma vie a alors redéfile sous mes yeux sous un autre angle…
Enfant, ce déguisement de romain qui était si excitant (je résume)
Adolescent, ce malaise à accompagner mes petites amies dans les boutiques de fringues, ce désir secret d’essayer moi-même ces robes qu’elle ne voulaient pas porter et ces escarpins qu’elles trouvaient trop hauts, etc.
Fort de ce constat, j’ai développé une vie secrète et parallèle, rendue de plus en plus aisée par les moyens modernes de shopping à distance et j’ai accumulé une petite garde robe qui me permet de vivre des petits moments de solitude en femme, ce qui me procure un apaisement mêlé de frustration car évidemment je ne suis pas du tout féminin, j’ai des épaules un torse, et je ne tromperais vraiment personne en sortant dans la rue comme cela 🙂
Ma femme a beau être très féminine, et malgré l’amour profond que je lui porte, elle reste un individu distinct de moi et d’une certaine manière me fait le même effet que la jeune femme croisée dans la rue : elle suscite sans cesse mon désir mais ne peut totalement le combler car je ne peux être dans son corps.
Cet arrangement me permet donc d’assouvir mes fulgurants élans fétichistes mais me laisse encore un goût de frustration.
Aujourd’hui j’ai l’impression de ne plus pouvoir progresser.
Pour résumer cette étrange situation :
– Je me sens merveilleusement bien habillé en femme, et si je passais le test de la baguette magique (oui, j’ai lu de nombreux autres messages sur ce site) je choisirais sans hésiter le sexe féminin. Je pourrais passer ma vie en robe sans hésiter, cela serait un grand soulagement que de ne plus se sentir obligée d’être homme et un apaisement que de ne plus désirer les femmes.
– Cependant je ne me sens pas du tout homo. C’est à première vue un mystère et je me suis demandé comment j’arrivais à concilier ce point avec le précédent. Je suppose que je spécule que si j’avais été une femme, je n’aurais pas eu à me poser cette question. J’aurais sans doute été attirée par des hommes… ou pas !
Outre les périodes de réelle dépression devant cette impasse, je souffre donc de solitude.
Je tiens à bien faire la part des choses entre ce qui est de l’ordre de la frustration sexuelle (je souhaiterais être désiré comme le sont les femmes, à condition d’en être une) et de la frustration de ne pas vivre tout simplement le quotidien en femme : ne serait-ce que de partir en promenade en ville serait pour moi une libération sans précédent.
Ce qui est tragi-comique, non ?
Voilà, je pourrais continuer des heures sur sujet… Il n’y a malheureusement pas vraiment de solution à mon problème – c’est d’ailleurs ce qui le rend parfois si douloureux – mais au moins une communauté comme la vôtre apporte un peu de réconfort par une écoute attentive.
Soyez-en remerciés.

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