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28 mars 2024

Quels sont les enjeux de santé mentale chez les personnes LGBTQ ?

Marie-Édith Vigneau

Je travaille présentement sur une dissertation au sujet de la santé mentale des personnes LGBTQ. J’ai 5 questions que j’aimerais recevoir la réponse d’un ou d’une professionelle afin d’enrichir mon travail.
1. Comment est-ce que dévoiler son orientation sexuelle à sa famille et aux amis peut avoir un impact négatif sur la santé mentale de quelqu’un?
2. Pourquoi est-ce que les personnes LGBTQ sont plus successible de se faire harceler?
3. Est-ce que les personnes LGBTQ sont plus successible de se faire violer?
4. Comment est-ce que la discrimination est toujours un problème au Canada?
5. Quels sont les différents moyens pour une personne LGBTQ avec des problèmes de santé mentale à chercher pour de l’aide?
Gabrielle
 
Bonjour Gabrielle !
Merci de nous écrire pour compléter ta dissertation. Quel sujet intéressant (ok, j’ai un parti pris) !

 

Il y a plusieurs différences entre le parcours de chaque personne LGBTQ, selon plusieurs facteurs: son identité de genre, son orientation sexuelle, son âge, la couleur de sa peau, sa situation géographique, son milieu socioéconomique, son éducation, ses valeurs et plus encore. Par exemple, un homme blanc gai et cisgenre n’aura pas la même expérience qu’une femme noire bisexuelle et trans. Cela dit, je vais te proposer des réponses et sources qui couvrent les expériences des personnes LGBTQ de la façon la plus inclusive possible, mais il faut garder en tête que cela risque d’effacer certains parcours plus marginalisés. 

1. Comment est-ce que dévoiler son orientation sexuelle à sa famille et aux amis peut avoir un impact négatif sur la santé mentale de quelqu’un?
 
Le coming-out peut être une grande source de stress. Selon le rapport de Rapport de recension des écrits sur les indicateurs d’inclusion et d’exclusion des personnes LGBTQ+ issu du projet SAVIE-LGBTQ+ de l’UQAM (2018), 55,8% des personnes LGBTQ+ craignent de dévoiler leur orientation sexuelle ou leur identité de genre à leur famille. Également, le coming-out peut être une expérience très agréable pour certain.e.s et désastreuse pour d’autres. Alors que le message véhiculé dans la société occidentale est que le coming-out est essentiel à une vie épanouie pour les personnes LGBTQ, ce n’est pas nécessairement le cas; dans certains milieux plus hostiles à la diversité sexuelle et à la pluralité des genres, la sortie du placard peut être néfaste. Je t’invite à lire la page 10 du rapport de recension des écrits du projet SAVIE-LGBTQ+ pour avoir des données sur l’exclusion des personnes LGBTQ+ en lien avec leur famille d’origine en raison de leur orientation sexuelle ou identité de genre. Nous pouvons faire des liens entre ces données et la multitude d’études qui démontrent que le soutien de la famille et des proches constitue un facteur de protection pour la santé mentale des personnes LGBTQ+, alors que le rejet de la part de ces mêmes personnes constitue un facteur de risque. À l’opposé, selon une étude Ryan et al. (2010), Family acceptance in adolescence and the health of LGBT young adults, l’acceptation de la part de la famille amène une meilleure estime de soi, un meilleur support social et une meilleure condition de santé générale. Cela protège également de la dépression, de l’abus de substances et des idées et comportements suicidaires (traduction libre).

2. Pourquoi est-ce que les personnes LGBTQ sont plus successible de se faire harceler?
 
Principalement à cause des LGBTQphobies et du sexisme. Le problème ne vient pas des personnes LGBTQ+ elles-mêmes, ni de leur identité de genre ou orientation sexuelle, mais bien de la perception sociale qu’en ont certain.e.s. Ces différentes formes d’oppression prennent racine dans ce que l’on nomme l’hétéronormativité, soit la présomption que tout le monde est hétérosexuel. L’hétéronormativité met donc en place un système dominant dans lequel les personnes qui ne respectent pas ces normes (comme les personnes non hétérosexuelles, trans, ou non conformes aux stéréotypes de leur genre) sont considérées comme étant inférieures.3. Est-ce que les personnes LGBTQ sont plus successible de se faire violer?
 
Oui, les agressions sexuelles sont plus fréquemment vécues par les personnes LGBTQ+ que par les personnes cisgenres et hétérosexuelles. Dès la page 25 et surtout dans le tableau 4, à la page 26 de ce document créé par la direction de la santé publique du Québec, tu peux trouver des informations à cet effet. De plus, Lavoie et al. (2017), dans une étude menée à l’Université Laval, à Québec, démontrent que 53% des personnes LGBTQ+ rapportent avoir été victimes d’au moins un harcèlement ou une agression à caractère sexuel. Ce ne sont que des statistiques parmi tant d’autres, tu peux en trouver une panoplie si tu cherches un peu.

4. Comment est-ce que la discrimination est toujours un problème au Canada?
 
La discrimination est toujours présente au niveau légal pour les personnes trans et non-binaires. Les personnes non-binaires sont discriminées entre autres par leurs obligations légales liées aux mentions de sexe: par exemple, sur les permis de conduire ou les cartes d’assurance-maladie. Il en est de même pour le passeport (pour l’instant, puisque la mention de sexe « X » sera bientôt accessible aux Canadien.ne.s – pour en savoir plus, c’est par ici !). Les personnes trans migrantes habitant le Québec doivent attendre d’avoir la citoyenneté canadienne (un processus qui prend généralement plusieurs années) avant de pouvoir changer leur mention de sexe sur leurs documents officiels, ce qui donne place à plusieurs situations où leur intégrité est compromise (par exemple, refus concernant les soins de santé, difficulté à trouver un logement, difficultés à ouvrir des comptes bancaires, etc.). Par ailleurs, lorsqu’un parent modifie son identité de genre, il demeure très difficile de modifier l’affiliation parentale de son enfant. Par exemple, un papa trans aura beaucoup de difficulté à modifier le certificat de naissance de son enfant pour y indiquer père au lieu de mère. Tu peux en lire un peu plus à ce sujet ici. On peut également nommé les violences à l’endroit des personnes intersexes, soit les personnes étant nées avec des caractéristiques hormonales et génitales ne correspondant pas aux critères proprement médicaux de ce qu’est un corps féminin ou un corps masculin. Le Canada n’interdit toujours pas les pratiques de chirurgies correctives non-consenties sur les corps des enfants intersexes. Finalement, certaines provinces n’ont toujours pas légiféré en ce qui concerne les thérapies de conversion sexuelleEn d’autres mots, certains soit disant thérapeutes ou groupes religieux conservateurs ouvertement homophobes offrent encore dans quelques provinces canadiennes des thérapies pour modifier l’orientation sexuelle ou l’identité de genre. Ce sont des pratiques très violentes pour les jeunes LGBTQ qui peuvent entraîner des effets néfastes sur leur perception de soi et leur santé mentale.
 
Au niveau social, les LGBTQphobies sont encore très présentes. Malgré certaines lois protégeant les personnes LGBTQ, elles rencontrent souvent des difficultés liées aux perceptions sociales de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre. Il y a des données à cet effet dans la revue de littérature du projet SAVIE-LGBTQ+. Un autre article intéressant à cet effet est celui-ci, de Kelleher (2009): Minority stress and health: Implications for lesbian, gay, bisexual, transgender, and questioning (LGBTQ) young people. Les résultats démontrent que l’environnement social oppressif créé par le stigma autour des identités LGBTQ ont des impacts négatifs sur le bien-être des jeunes LGBTQ (traduction libre).
5. Quels sont les différents moyens pour une personne LGBTQ avec des problèmes de santé mentale à chercher pour de l’aide?
 
Les personnes LGBTQ+ qui présentent des problèmes de santé mentale peuvent avoir recours aux mêmes ressources que les personnes cisgenres hétérosexuelles qui cherchent de l’aide. Cependant, elles peuvent se buter à des institutions ou organismes, ou encore à des intervenant.e.s ayant des préjugés LGBTQphobes ou n’étant simplement pas outillés sur les réalités LGBTQ. C’est pourquoi il y a certains organismes ou cliniques qui offrent des services spécifiques aux personnes LGBTQ+ (par exemple, à l’Institut Agyle, à Montréal, il est possible de prendre rendez-vous avec un.e professionnel.le faisant partie de la Pride team). Il y a aussi certaines lignes d’écoute disponibles pour les personnes LGBTQ+, par exemple, la LGBT Youth Line à Toronto. 
 
 
Voilà ! N’hésite pas à nous réécrire au besoin, d’accord ?
Passe une excellente semaine !
Marie-Édith, B.A. sexologie, pour AlterHéros

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