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5 mars 2019

Une amie est victime de violence conjugale... comment intervenir ?

Jessica

Bonjour AlterHéros ! Je vous écris puisque j’ai besoin d’un avis extérieur à mon cercle de proches.
J’ai appris récemment qu’une amie (V.) avec qui je n’ai plus de contacts depuis quelques temps à cause d’une histoire de jalousie, vit de la violence conjugale. Je n’ose pas lui donner signe de vie parce que je sais que ma seule existence est un trigger pour sa blonde – nous avons (V. et moi) une histoire de désir (et peut-être d’amour?) réciproque qui a duré pendant des années sans être complètement exploré et c’est très difficile pour sa blonde de composer avec ça, particulièrement parce que je n’ai pas toujours respecté les ententes de mes anciennes relations monogames. Je suis sortie du décor parce que j’étais très déçue de voir que la discussion n’était pas possible et surtout parce que sa conjointe m’a fait vivre de la violence psychologique. J’ai repris contact avec V. à quelques reprises mais elle tenait vraiment à sa relation actuelle et m’a signifié qu’elle n’était pas confortable dans cette situation «entre deux chaises» alors j’ai préféré me retirer.
En ce moment, je ne sais pas trop quoi faire. J’ai des preuves de ces violences, mais je sais que V. ne souhaite pas en parler et ne souhaite pas quitter sa conjointe actuellement. Je n’ai pas envie de contacter la police, parce que… bah, la police. Je ne veux pas non plus que V. vive plus de violences si je donne signe de vie, mais je ne souhaite pas non plus qu’elle souffre tout court. Notons que je n’ai pas (ou plus?) de sentiments amoureux pour elle – j’ai certes du désir mais je ne souhaite pas l’actualiser actuellement. Mon objectif est simplement de lui signifier que je suis là – la raison pour laquelle je n’avais plus de contacts avec elle était pour nous protéger, mais visiblement, ça ne donne pas grand chose…
Voilà, qu’en pensez-vous? Devrais-je entrer en contact avec elle? Si oui, comment? Sinon, quoi faire face à cette situation?
Merci beaucoup !
Rose
 
Salut Rose,
Tout d’abord, merci de faire confiance à AlterHéros en nous écrivant. Si je comprends bien, tu sembles préoccupée par ton amie V. et ne sait pas comment t’y prendre pour la supporter dans sa relation que nous pouvons juger de toxique. Sache qu’il est tout à fait raisonnable d’être préoccupée par cette relation. De plus, je semble comprendre que tu as vécu toi aussi de la violence psychologique de la part de sa copine. Il serait tout à fait normal que tu ne sois pas à l’aise d’intervenir dans ce genre de situation, surtout que tu ne souhaites pas que ton intervention vienne t’éloigner davantage de V., ou encore, que celle-ci subisse davantage de violences de sa copine si cette dernière prenait connaissance de ta prise de contact.
 
Tu mentionnes que ta situation avec la victime est un « trigger » pour la blonde de V., alors je crois que si tu décides d’intervenir toi-même, il serait important de bien intervenir. Je t’invite donc à consulter des ressources spécialisées avec la violence conjugale. Voici un site web qui pourra t’aider si tu crois qu’elle peut vivre de la violence à caractère sexuelle : http://rqcalacs.qc.ca/calacs.php. C’est le site web des C.A.L.A.C.S. (centres d’aide et de lutte contre les agressions à caractères sexuelles). Ils ont une ligne d’écoute aussi au numéro suivant : 1-888-933-9007. Je vois que tu habites dans la région de la Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine ; il existe deux C.A.L.A.C.S dans cette région : l’un en Gaspésie, l’autre aux Îles-de-la-Madeleine. Je te laisse leurs coordonnées, si jamais tu souhaites leur communiquer tes préoccupations et leur partager ta situation anonymement. Les intervenantes de ces centres pourront fort assurément te proposer des pistes de solution, adaptées au territoire dans lequel tu te situes et adaptées à la situation actuelle. Il n’existe malheureusement que peu de ressources communautaires pour les personnes LGBTQ+ survivantes de violence conjugale ou sexuelle au Québec… toutefois, les ressources communautaires en contexte périphérique vont souvent preuve d’une très grande inclusivité afin de s’adapter à l’ensemble des situations qui peuvent arriver sur leur territoire. C’est pourquoi je me permets de te partager leurs coordonnées : 

CALACS L’Espoir des Îles

735 chemin Principal, porte 204
Cap-aux-Meules Îles-de-la-Madeleine, Québec G4T 1G8
418-986-6111
418-986-6411 (Télécopieur)
calacsdesiles@ilesdelamadeleine.ca
 

CALACS La Bôme Gaspésie

Gaspé, Québec  C.P. 6160, G4X 2R7
418-368-6686
418-368-8096 (télécopieur)
calacsdelabomegaspesie@gmail.com
www.calacslabomegaspesie.com
 
Il peut s’avérer difficile de soutenir des personnes victimes de violence conjugale. Malgré la violence vécue, ces dernières ressentent parfois encore un attachement émotionnel important envers leur partenaire. Ces personnes, bien que parfois conscientes des abus vécus, peuvent s’accrocher à l’idée que la situation se réglera, peuvent avoir tendance à se responsabilité elles-mêmes de vivre ces violences ou peuvent avoir l’impression de ne pas en faire assez, ne ne pas voir essayer assez… Dans ce contexte, elles n’oseront peut-être pas en parler à leurs proches, n’oseront pas quitter la situation dans laquelle elle se trouve. En tant que personnes proches, nous pouvons aussi ressentir la crainte de voir le lien de proximité (parfois déjà fragile) se fragiliser encore plus si on aborde la question de la violence conjugale à ses côtés. Ne pas savoir exactement quoi faire dans ce genre de situation est complètement compréhensible, et surtout, il est important de respecter le rythme des victimes dans la compréhension du cycle de violence qu’elles vivent. Je te laisse un petit schéma du cycle de la violence conjugale… il peut s’agir d’une image intéressante pour aborder la discussion auprès de V., afin de la soutenir à identifier elle-même le propre cycle de violence dans lequel elle se trouve :
 

 
Maintenant, intervenir ou non ? J’en comprends qu’il s’agit d’un dilemme important. Premièrement, est-ce que tu considères que tu es la meilleure personne, dans ce contexte, pour aborder V. ? Est-ce que vous avez des proches, en commun, qui pourraient prendre cette responsabilité à ta place ? Deuxièmement, si tu prends la décision de la contacter, il peut être prudent pour la sécurité de V. qu’il n’y ait pas de traces associées à ta prise de contact que sa copine pourrait découvrir. Lui téléphoner via un numéro confidentiel, par exemple, à un moment où tu es certaine que sa copine ne se trouve pas à ses côtés serait possiblement une option intéressante.
Pendant cet appel téléphonique, cela pourrait être l’occasion de lui réitérer que tu gardes la porte ouverte si elle ressent le besoin de te parler de la situation qu’elle vit; que tu demeures présente, sans jugement, pour écouter et valider l’ensemble de ses émotions ; que tu tiens beaucoup à elle et que tu te préoccupes de son bien-être. Pendant cette discussion, il peut être stratégique selon moi de ne pas parler contre sa copine, mais d’uniquement prendre position contre la violence qu’elle vit. Ce sera ainsi l’occasion de soutenir V. à reconnaître elle-même la situation qu’elle vit et à l’inviter à réfléchir à des moyens afin qu’elle puisse mettre fin à la violence en question. Lui rappeler qu’il existe plein de gens prêts à la soutenir en cas de besoin, qu’elle n’est pas responsable de cette situation. Et surtout, de ne jamais lui dire ce qu’elle doit faire. V. est l’experte de sa propre situation, conséquemment, les solutions doivent provenir d’elle-même.
 
J’ai envie de te dire qu’il n’y a pas qu’une seule bonne solution dans ce genre de situation… Tu sembles déjà avoir analysé en profondeur les différentes options en tenant compte de ta position particulière dans cette dynamique. Je suis certaine que tu sauras agir avec prudence et amour.
 
Voici aussi un site web pour les gens qui vivent de la violence conjugale, en fait, l’INSPQ a mis un onglet « soutien à la victime » : https://www.inspq.qc.ca/violence-conjugale/ressources/soutien-la-victime. Je te cite les recommandations de l’INSPQ à cet égard, peut-être cela pourra t’éclairer un peu :

COMMENT L’ENTOURAGE PEUT-IL AIDER UNE VICTIME?

Lorsqu’une personne croit qu’une femme ou un homme de son entourage est victime de violence conjugale, elle doit aller vérifier ses soupçons. S’ils s’avèrent fondés, elle doit :

  • aborder la victime potentielle de façon compréhensive, sans la blâmer, en se rappelant qu’il est difficile pour les victimes de parler de la violence vécue;
  • l’écouter, lui offrir son soutien et éviter qu’elle s’isole;
  • lui laisser prendre sa propre décision, sans lui dire quoi faire (elle est l’experte de sa situation);
  • lui rappeler que la violence est inacceptable, que son conjoint est le seul responsable de ses actes et qu’elle ne mérite pas qu’il la traite de la sorte; éviter de parler contre le conjoint et parler plutôt contre le comportement violent;
  • lui donner de l’information sur les ressources locales et l’encourager à aller chercher de l’aide;
  • l’inciter à porter plainte si elle est victime d’actes qui constituent des infractions en vertu du Code criminel; la soutenir et la guider vers les ressources qui peuvent l’accompagner dans ses démarches.

Toute personne témoin d’un incident de violence conjugale grave doit le signaler à la police. Le signalement peut être fait de façon anonyme.
L’onglet « ressources » de ce site internet comporte également plusieurs liens intéressants. Voici d’ailleurs une dernière ressource : la ligne téléphonique S.O.S. violence conjugale : 1 800 363-9010. Il s’agit également d’un numéro de téléphone que tu pourrais partager à V. si elle souhaite discuter de sa situation, de façon anonyme, à quelqu’un se trouvant à l’extérieur de son cercle social.

J’aimerais que tu saches que la plupart des ressources sont confidentielles et elles pourront t’aider plus précisément à ton cas. N’hésite surtout pas à nous recontacter si tu veux de l’aide ou avoir d’autres informations.

Jessica White

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